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Le Monde de Sophie, Une épopée dans le fabuleux continent de la philosophie

L’histoire

Sophie est une adolescente de 15 ans qui mène une vie tranquille dans un village de Norvège avec sa mère. Un jour, elle reçoit un courrier d’un expéditeur inconnu qui contient des cours de philosophie. La jeune fille fait un voyage au cœur de la pensée des présocratiques. Mais curieuse à la façon des héroïnes de romans de jeunesse, elle veut à tout prix savoir qui est l’auteur de ces lettres mystérieuses qui lui font découvrir les grandes figures de la philosophie occidentale. Refusant de se contenter d’être une lectrice passive de leçons de plus en plus passionnantes, elle décide d’aller à la recherche du professeur mystère, bien déterminée à découvrir son identité.

Un roman qui initie à la philosophie

N’importe quelle personne qui s’intéresse un tant soit peu à la philosophie a déjà eu cette envie de mieux comprendre les théories complexes des grands philosophes. Qui n’a pas eu le sentiment de patauger devant les systèmes de pensée élaborés de Spinoza, Kant ou Hegel ? Josteein Gaarder a cette incroyable faculté de rendre accessibles et claires les pensées de ces grands noms de la philosophie. Parce qu’il faut bien vulgariser pour transmettre des concepts difficiles à une adolescente de 15 ans qui n’y connaît rien. La force de l’auteur est d’expliciter les théories de manière simple tout en parvenant à conserver leur subtilité et leur profondeur. Moi qui croyais n’en apprendre que très peu et m’intéressant davantage au livre pour sa dimension romanesque, j’ai réellement pu me familiariser avec la pensée de Hegel (que je connaissais peu), d’Aristote, de George Berkeley, de Saint Thomas d’Aquin et approfondir mon savoir de la philosophie de Kant, de Spinoza, des présocratiques, des romantiques, de Darwin et de bien d’autres ! J. Gaarder a une connaissance approfondie de l’histoire de la philosophie et en même temps, un vrai talent de pédagogue pour permettre au lecteur novice ou un peu plus confirmé de saisir l’évolution des courants de pensée à travers les siècles. Pour peu qu’on aime réfléchir et se questionner, cet ouvrage offre vraiment matière à se plonger avec plaisir dans cette succession de visions du monde et d’écoles de pensée.

Une trame romanesque d’une grande originalité 

En parallèle de ces cours de vulgarisation philosophique qui peuvent s’avérer d’une grande utilité pour un lycéen de terminale ou toute personne désireuse de développer sa culture philosophique, Jostein Gaarder a, en parallèle, développé une trame pleine de suspense qui maintient le lecteur en haleine et lui donne envie d’en savoir davantage. Pourquoi Sophie reçoit-elle des cours de philosophie venant d’un parfait inconnu ? Qui est cette Hilde dont parle l’expéditeur du courrier et qui est apparemment l’autre destinataire de ces lettres ? Et en avançant dans le récit, des énigmes se résolvent tandis que d’autres apparaissent. Sans en divulguer davantage sur le roman, je dirais que l’auteur propose une réflexion passionnante sur la création littéraire à travers une mise en abyme à laquelle seul un vrai littéraire aurait pu penser. Comme un clin d’œil au lecteur, Gaarder nous plonge dans une intrigue qui nous questionne sur le processus de création, le libre-arbitre, les personnages de roman, mêlant ainsi avec brio texte d’initiation à la philosophie et intrigue romanesque. Vous l’aurez compris, j’ai été conquise par ce texte – que j’aurais sans doute dû lire une décennie plus tôt – et je vous le recommande totalement si vous voulez faire un voyage dans le continent fascinant de la philosophie !

Extraits

« – Il faut que tu répondes encore à une dernière question. Imagine deux vieux arbres fruitiers qui ont été plantés en même temps dans un grand jardin. L’un a poussé au soleil et a bénéficié d’une terre riche et bien arrosée, alors que l’autre a poussé à l’ombre sur un sol pauvre. Quel arbre sera le plus grand et portera le plus de fruits ?

– Evidemment celui qui aura eu les meilleures conditions pour pousser.

– Eh bien, pour Spinoza, cet arbre est libre, à savoir qu’il a la liberté de développer toutes les possibilités qu’il porte en lui. Bien sûr, s’il s’agit d’un pommier, il n’y a aucune chance pour qu’il donne des poires ou des prunes. Il en va de même pour nous les hommes. Nous pouvons rencontrer des obstacles, par exemple d’ordre politique, qui freineront notre croissance personnelle. Des contraintes extérieures peuvent nous inhiber, aussi est-ce seulement quand nous pouvons « librement » développer toutes nos possibilités en puissance que nous vivons en hommes libres. Mais nous restons en un sens tout aussi tributaires de nos dispositions de départ et des conditions extérieures qu’un petit garçon de l’âge de pierre, un lion en Afrique ou un pommier du jardin. »

« – Que deux choses se succèdent dans le temps ne signifie pas nécessairement qu’il y a un lien de causalité. C’est un des premiers devoirs du philosophe que de mettre justement en garde les hommes contre la tentation de tirer trop rapidement des conclusions. Car on court alors le risque de retomber dans la superstition.

– Comment ça ?

– Un chat noir traverse la rue devant toi. Un peu plus tard dans la journée, tu tombes et te casses un bras. Et pourtant il n’y a aucun lien de cause à effet entre les deux événements. Dans le domaine scientifique, il s’agit aussi de rester très vigilant : même si beaucoup de personnes guérissent après avoir pris un certain médicament, rien ne prouve que c’est le médicament qui les a guéries. C’est pourquoi il est important de faire croire à une équipe volontaire qu’ils reçoivent le même médicament, alors qu’on ne leur donne qu’un placebo à base de farine et d’eau. Si ces personnes-là guérissent aussi, c’est alors la preuve qu’il y a un troisième facteur en jeu, comme la foi dans le médicament par exemple. »

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